Les recherches académiques sur l’effet « pays d’origine »
Depuis
l’article séminal de R. D. Schooler en 1965[1],
l’effet « pays d’origine » est une thématique de recherche qui a
donné lieu à de nombreux travaux et publications de la part de chercheurs spécialistes
du marketing international (pour une recension, voir Usunier (2006) [2]
et Josiassen et Harzing (2008)[3]).
Ces travaux
ont dans leur grande majorité cherché à évaluer l’impact du « pays
d’origine » sur la qualité perçue des produits, l’attitude des clients [4] et/ou leurs intentions d’achat .
Il existe un
relatif consensus sur le fait que le « pays d’origine » influe sur la
qualité perçue. Ceci étant, les
travaux mettent en évidence que cet effet n’est pas mécanique. Il est variable
et dépend d’un certain nombre de facteurs, encore qualifiés de variables
modératrices : type de produit (bien de recherche, d’expérience ou de
confiance, bien plus ou moins signifiant…), catégorie de produit (luxe, high
tech…), profil du client (âge, catégorie socioprofessionnelle,
nationalité…), etc.
Les effets
sur l’attitude et l’intention d’achat sont eux moins
tranchés (les résultats diffèrent selon les études). Globalement, ils semblent
être d’une moindre intensité que ceux identifiés pour la qualité perçue. Cela
pourrait être lié au fait que les études ressaisissent les réponses de
clients-citoyens. Or on sait que placées dans un environnement strictement
marchand, par exemple, une grande surface, ces mêmes personnes n’agissent pas
pleinement en conformité avec leurs déclarations. Cela est lié non pas au fait
que ces personnes ne seraient pas fiables mais au fait que leurs préférences
sont influencées par l’environnement institutionnel dans lequel elles évoluent.
En l’occurrence, l’environnement marchand a tendance à effacer les « beaux
traits » (nice traits) et les
valeurs citoyennes des personnes. Reste que les recherches ont peu testé à ce
jour les déterminants de tels écarts ce qui va de pair avec le fait qu’elles ne
traitent pas de l’effet « pays d’origine » sur les comportements
effectifs d’achat (elles en restent au mieux à l’intention d’achat (déclarée)).
Les travaux
du champ mettent également en évidence que l’internationalisation des
entreprises et plus largement la mondialisation ont modifié l’effet « pays
d’origine ». Les produits sont de plus en plus hybrides, « bi-nationaux » :
conçu dans un pays, les composants du produit peuvent être fabriqués et
assemblés dans des pays tiers. Cela n’a pas pour autant conduit à effacer
l’effet « pays d’origine ». Néanmoins, cela a une incidence sur sa
nature. Le pays de fabrication du produit (country
of manufacture) n’est plus central. C’est le pays avec lequel le produit
est associé (country of association,
country of brand) qui compte. Autrement dit, l’effet pays qui était
antérieurement essentiellement un effet « pays d’origine de fabrication »,
est de plus en plus un effet « pays d’origine du design ». Il en va ainsi des produits marqués Nike. Leur
vente est facilitée par le fait que les clients les associent aux Etats-Unis (country of association, country of brand). Le fait qu’ils aient
été fabriqués en Asie ou ailleurs (country
of manufacture) compte peu (les études révèlent que très peu de clients
connaissent et s’intéressent au pays d’origine de fabrication). Bien entendu,
cela n’est pas systématique. Des variables modératrices jouent (type de
produit, profil du client, etc.).
[1] Schooler Robert D. (1965),
« Product bias in the Central American common market », Journal of Marketing Research, 2 (4),
pp. 394-397.
[2] Usunier Jean-Claude (2006), « Relevance in business research:
the case of country-of-origin research in marketing », European Management Review, 3 (1), pp.
60-73.
[3] Josiassen Alexander et Anne-Wil Harzing
(2008), « Descending
from the Ivory Tower: Reflections on the Relevance and Future of
Country-of-Origin Research », European Management Review, 5 (4), pp. 264-270.
[4] Prédisposition favorable ou défavorable
vis-à-vis d’un produit ou d’une marque. Elle a trois composantes :
cognitive (ce que le client connaît sur un produit ou une marque), affective
(ce que le client aime ou n’aime pas dans un produit ou une marque) et connative
(prédisposition à l’acte d’achat).
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